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Séminaire de recherche 2019-2020
lundi 23 mars 2020
"Mondes indiens"
Organisé par Daniele CUNEO (Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3)
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4 décembre 2019, 11h00-12h30
 
Catherina GUENZI, Maîtresse de conférences (EHESS)
Lire la Karmavipākasaṃhitā
Université Sorbonne Nouvelle, Centre Censier
13 rue de Santeuil, 75005 Paris, salle 123 (1e étage)
 
Composé en Inde du Nord probablement au début du XVIIIe siècle, la Karmavipākasaṃhitā, "Collection sur la maturation des actes", est un traité sanskrit destiné à être utilisé dans le cadre d’une consultation (praśna, « interrogation ») entre un spécialiste brahmane et un pṛcchaka (« enquêteur ») souffrant d’infertilité et d’autres maladies. Les vies antérieures du patient, ainsi que les rituels d’expiation (prāyaścitta) à suivre pour obtenir la guérison, sont identifiés selon la constellation lunaire (nakṣatra) de naissance. En reprenant la notion de « genre épistémique » élaborée par Gianna Pomata, j’interrogerai la singularité de ce traité brahmanique qui combine de manière originale récit et doctrine, étude de cas et approche nomothétique, déterminisme astral et responsabilité morale.
 
Caterina Guenzi est maîtresse de conférences à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS) et membre du Centre d’études de l’Inde et de l’Asie du Sud (CEIAS). Elle dirige actuellement L’Homme : revue française d’anthropologie. En combinant l’étude de terrain et l’analyse de sources textuelles, ses recherches portent sur les pratiques divinatoires comme lieu d’intersection entre savoirs scientifiques, médicaux et rituels en Inde du Nord. Elle est l’auteur de Le discours du destin : la pratique de l’astrologie à Bénarès (2013) et prépare actuellement une traduction commentée de la Karmavipākasaṃhitā.
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13 novembre 2019, 11h00-12h30
 
Vincent TOURNIER, Maître de conférences (EFEO)
Commémoration des morts et idéal du Bodhisattva à Ajanta
Université Sorbonne Nouvelle, Centre Censier
13 rue de Santeuil, 75005 Paris, salle 123 (1e étage)
 
Cette conférence se concentrera sur la seconde période d’occupation des falaises d’Ajanta (Ve-VIe s. apr. J.-C.), marquant le plein essor de ce site bouddhique exceptionnel. L’examen portera en particulier sur le corpus épigraphique associé aux donations de grottes ou d’images. Ce corpus comprend quatre-vingt-dix-huit inscriptions, inégalement éditées, relevant principalement de deux types épigraphiques : (1) des courtes dédicaces, employant un formulaire préétabli et auxquelles se rattachent parfois des citations scripturaires ; (2) des inscriptions en vers, créations ad hoc pour (ou par) des donateurs importants. Ce corpus est particulièrement riche pour mesurer la diversité des aspirations religieuses d’une communauté bouddhique donnée et le rapport de ces conceptions aux sources prescriptives. Il gagne à être compris non seulement à la lumière des parallèles littéraires auxquels font écho les formulaires épigraphiques, mais aussi en rapport avec le contexte monumental et iconographique de l’écrit. On montrera comment les donateurs d’Ajanta, moines ou laïcs, combinèrent aspirations d’ordre sotériologique, alignées sur les prescriptions de manuels composés pour les candidats à l’Éveil, et attentes plus « mondaines » (laukika) — l’obtention de renaissances célestes et parmi les puissants — pour eux-mêmes et pour leurs proches défunts.
 
Formé à l’université de Strasbourg en histoire et sciences de l’Antiquité, puis aux études indiennes et bouddhiques à l’École pratique des hautes études, Vincent Tournier y obtint son doctorat en 2012. Après des recherches post-doctorales à l’université de Leyde, il fut Lecturer en études bouddhiques à la School of Oriental and African Studies (Londres) et directeur du SOAS Centre of Buddhist Studies, de 2013 à 2017. Maître de conférence de l’EFEO depuis 2018, il enseigne à l’EPHE et au sein de PSL, dans le domaine de l’histoire et des traditions textuelles du bouddhisme dans le monde indien. Ses publications incluent La formation du Mahāvastu et la mise en place des conceptions relatives à la carrière du bodhisattva (EFEO, 2017 ; prix Colette Caillat de l’Institut de France pour l’année 2018) et le corpus épigraphique en ligne Early Inscriptions of Āndhradeśa (epigraphia.efeo.fr/andhra, co-dirigé avec Arlo Griffiths).
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16 octobre 2019, 11h00-12h30
 
Nicolas DEJENNE, Maître de conférences (Sorbonne Nouvelle – Paris 3)
Histoire et mémoire de Brahmendra Swami, guru des Peshwa (première moitié du XVIIIe siècle)
Université Sorbonne Nouvelle, Centre Censier
13 rue de Santeuil, 75005 Paris, salle 410 (4e étage)
 
Brahmendra Swami (ca 1650-1745) est un personnage remarquable de la période d’apogée du pouvoir marathe, du règne de Shivaji (1674-1680) à celui des Peshwa de Pune, « premiers ministres » et véritables dirigeants de l’empire marathe (1713-1818). Brahmane né dans l’intérieur du Maharashtra actuel, il s’installe vers 1685, après des années de formation assez mal connues, dans la région côtière du Konkan où il acquiert peu à peu une réputation de maître spirituel (mahāpuruṣa) auprès des divers pouvoirs en rivalité dans la région. Il accède à un rôle politique officieux mais important quand Balaji Vishvanath Bhat, qui le révère, devient Peshwa en 1713, et il conserve cette influence auprès de son successeur Baji Rao Ier à l’avènement duquel il s’installe dans un village proche à la fois de Pune et de Satara, les deux centres du pouvoir marathe. Fervent disciple de Paraśurāma, fondateur légendaire de la côte ouest de l’Inde et figure tutélaire des Peshwa, il promeut son culte au cours de sa très longue vie.
Nous verrons que, depuis la fin du XIXe siècle, l’historiographie sur Brahmendra Swami reste divisée, que ce soit au sujet de l’influence réelle – religieuse, politique mais aussi économique – qu’il a exercée auprès des puissants, ou de la spiritualité de ce guru impliqué dans les intrigues de cour et fort soucieux des richesses matérielles. Mais à côté de ces débats académiques, il existe aussi dans l’ouest du Maharashtra une « longue mémoire » de Brahmendra Swami, comme nous avons pu l’observer lors de missions menées en 2017 et 2018 : une mémoire communautaire locale à Dhavadashi, le village où il vécut ses deux dernières décennies, et une mémoire plus religieuse, « paraśurāmaïte », dont témoignent les tentatives d’appropriation des lieux de passage du Swami par les fidèles d’un guru marathi de la seconde moitié du XXe siècle, Shri Gajanan Maharaj.
 
Nicolas Dejenne est maître de conférences en « Histoire et traditions textuelles du monde indien » à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, membre de l’équipe de recherche Mondes iranien et indien et chercheur associé à l’Institut français de Pondichéry. Ses recherches portent sur la littérature épique et purāṇique sanskrite et sa postérité et sur l’histoire des études indiennes. Il coordonne, avec A. Castaing (CNRS) et Cl. Le Blanc (Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3), le projet DELI – Dictionnaire Encyclopédique des Littératures de l’Inde. Il a récemment dirigé avec E. Tignol un numéro spécial de la revue Archiv Orientální. Journal of African a nd Asian Studies, Vol. 86.2 (2018), intitulé « Expressions de la bhakti dans les littératures indiennes ».
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